Le Messager, octobre 1915, p. 107-108
16 Septembre 1915
Chers frères et soeurs,
C'est dans l'abri de la tranchée que je vous écris ces quelques lignes. Voilà cinq mois que je suis sur le front, où je fais de bonnes expériences.
Dieu a été avec moi malgré ma faiblesse, et m'a béni abondamment. Je jouis d'une santé excellente, grâce à Dieu.
Mon plus grand désir est de rentrer le plus tôt possible dans l'oeuvre du Seigneur ; car à présent mieux que jamais je comprends l'amour insondable du Sauveur, et la nécessité absolue d'annoncer avec rapidité l'Evangile éternel. Qu'il nous aide à être fidèles au devoir !
Bien souvent les paroles du Psaume 86 : 15-16 ont été le cri de mon âme, et l'Eternel m'a donné sa force ; il m'a délivré du mal, et par sa puissance infinie je peux annoncer l'Evangile à mes camarades. Voici comment je procède :
Chaque mois je leur prête Les Signes des Temps, qui sont lus par presque tous les soldats de la section ; je dépose ensuite le journal dans un endroit très en vue du cantonnement, ou entre deux madriers de la "cagnat", et de cette façon ceux qui nous remplacent peuvent à leur tour en prendre connaissance.
J'ai un Nouveau Testament, et une Bible qu'ils lisent avec beaucoup d'intérêt. Je leur explique les prophéties, et c'est ainsi que dans la "hutte" de la tranchée, j'ai expliqué le chapitre 2 de Daniel à une dizaine d'entre eux. Ils étaient tous très étonnés des prédictions bibliques. Plusieurs fois je leur ai expliqué la question d'Orient.
Il y a deux ou trois jours, je leur ai lu, dans l'abri souterrain, à la lueur d'une bougie, quelques articles des Signes. J'ai si bien réussi à les intéresser qu'après la lecture plusieurs me demandèrent le journal pour le lendemain. Beaucoup d'autres exemples pourraient être cités qui montrent comment Dieu se révèle ici au front .
Chers frères et soeurs, priez de bénir le peu de travail que j'accomplis avec beaucoup de difficultés. Puisse-t-il nous garder fidèles jusqu à son glorieux retour !
"Voilà le Dieu qui est notre Dieu éternellement et à jamais ; il sera notre guide jusqu'à la mort." Ps. 48 : 15.
Votre frère dévoué,
J. Calviac
414e régiment d'inf. 11e Com. 3e. Bap, 5e Esc, Sec. Postal 164
Le Messager, janvier 1916, p.19
Chers frères et soeurs,
C'est de l'hôpital que je vous écris ces quelques lignes.
Dieu m'a accordé le privilège de soigner les blessés ; privilège d'autant plus grand qu'il me dispense de tuer mon prochain, si barbare qu'il soit, et qu il me permet d'observer le 4me commandement avec beaucoup de facilité.
Je suis entièrement à l'abri du froid et de l'humidité, et presque totalement des engins de destruction.
Ma tâche journalière quoique triste ne manque pas d'intérêt ; car je suis affecté aux salles d'opérations et de pansements.
Il y a juste un an aujourd'hui que j'ai répondu à mon ordre de marche, et, si je jette un coup d'oeil rétrospectif sur cette année écoulée je ne puis faire autrement que de louer Dieu; à maintes occasions j'ai vu sa main bénissante se poser sur moi et me délivrer au moment critique.
J'ai eu de bons entretiens avec plusieurs de mes camarades, mais les nécessités du servie nous ayant dispersés, je ne puis maintenant que correspondre avec eux.
Tout prosélitisme étant rigoureusement interdit dans le hôpitaux, il ne m'est pas possible de faire autre chose que de placer les Signes et autres publications sur la table et de prier, afin que ces feuilles, lues par la plupart des blessés, accomplissent un travail que je ne puis faire.
" Sauve-nous, Dieu de notre salut. Rassemble-nous, retire-nous du milieu des nations afin que nous célébrions ton saint nom et que nous mettions notre gloire à te louer !" 1 Chron. 16 : 34-35.
Votre dévoué
M. J. Buraud, infirmier
Hôpital complémentaire d'armée, Secteur Postal 96