Pierre Lanarès (24 août 1912- 2 février 2004)
Pierre Lanarès avait choisi le Foyer du Romarin pour terminer sa route. Il s’y est endormi paisiblement le 2 février dans la soirée, en tenant la main de sa petite-fille Fabienne.
La maison de la famille Samperio, si proche du Romarin, était son précieux refuge où il se savait toujours si bien accueilli. Les sourires et la joie de vivre des quatre enfants, très attachés à leur Grand-Papy, lui redonnaient force et courage. Les séjours fréquents de son épouse Edith, les visites régulières de ses enfants et les soins de l’équipe du Romarin ont adouci cette dernière étape.
Pierre Lanarès est né à Madagascar le 24 août 1912. Il a cinq ans lorsqu’il découvre la France, son père, administrateur des colonies, quittant Madagascar en 1917 pour servir son pays au côté des troupes malgaches. De la Dordogne, d’où sont originaires ses parents, Pierre Lanarès se rend à Paris et prépare son baccalauréat au Lycée Henri IV. Désireux de suivre les traces de son père, il se prépare au concours d’entrée à l’école coloniale (ENA). Puis, après avoir satisfait aux exigences du service militaire, il obtient en 1937 une licence en droit. C’est alors qu’il se sent une vocation pastorale.
On peut imaginer le caractère important de ce changement pour sa famille, puisqu’il était destiné à faire partie de la haute administration française et à servir son pays en terre étrangère. Mais Dieu a des façons de nous surprendre. Pierre Lanarès se rend donc au Séminaire adventiste de Collonges-sous-Salève où, accumulant cours et travaux recherche, il acquiert une formation pastorale de base entre 1937 et 1938. De septembre 1938 à juillet 1951, il est nommé pasteur à Tours, puis Angers et Marseille. Au tout début de son ministère pastoral, en novembre 1938, il épouse Edith Meyer, qui lui donnera quatre enfants : Jean-Pierre, Danièle, Claire et Jacques. En automne 1951, il est appelé à la direction du Séminaire adventiste de Collonges, fonction qu’il occupe jusqu’en juin 1960. Les étudiants se souviennent de lui comme d’un homme de cœur, engagé et méthodique. Il se dégage de sa personne chaleur et amitié, amour de Dieu et des hommes.
L’évolution sociale et politique du monde le préoccupe beaucoup. Il écrit Où allons-nous ? (1947), L’Asie et le sort du monde (1955), Qui dominera le monde ? (1959), Mystère d’Israël (1975), Faire face au désordre mondial (1993). En 1960, il remplace Maurice Tièche à Paris et produit 300 émissions éducatives et religieuses sur Radio France. En 1975, il publiera Les secrets de l’amour.
En 1963, Pierre Lanarès se rend à Madagascar, non comme administrateur des colonies, mais pour présider pendant trois ans au développement de l’Eglise adventiste dans l’océan Indien. En 1964, il soutient à Genève sa thèse de doctorat : « La liberté religieuse dans les conventions internationales et dans le droit public général ». La suite logique fait qu’en 1966, il devient secrétaire général de l’Association internationale pour la défense de la liberté religieuse, poste qu’il occupe jusqu’en 1984. Pendant 18 ans, il voyagera beaucoup, rencontrera des chefs d’Etat, les papes Paul VI et Jean-Paul II, le patriarche Athénagoras, se liera avec Léopold Sédar Senghor, André Chouraqui, Jacques Ellul, fera trois fois le tour du monde en voyage d’étude. Il aura l’occasion de parcourir les couloirs de centaines de palais présidentiels et universités, dialoguera avec les autorités communistes ou musulmanes pour la défense de la liberté de conscience, dirigera la revue Conscience et liberté, et fera doter l’association du statut consultatif auprès des Nations Unies, du Conseil de l’Europe et de L’Unesco. Ses nombreux articles sur la défense de la liberté de conscience lui valent une réputation internationale. On imagine toute la somme d’abnégation et de disponibilité que ce service a représenté pour son épouse Edith. Car qui dit voyages dit absences, qui dit mission dit séparations, qui dit publications dit secrétariat. En rendant hommage à l’homme, nous le rendons aussi à son épouse et à ses enfants. Souvenons-nous de toutes les portes que Pierre Lanarès a ouvertes, comme celles du Foyer du Romarin (anciennement Pignan), de la chapelle de Collonges, de la revue Conscience et liberté, de la télévision ou celles qu’il a franchies grâce à la vie pastorale, la direction du Séminaire, l’enseignement, la recherche pour sa thèse, l’administration missionnaire, la défense de la liberté religieuse à laquelle d’ailleurs il s’est attaché au-delà de l’âge de la retraite. Rappelons un de ses textes bibliques de référence, l’exhortation de Dieu à Josué à la veille de la conquête du pays de Canaan : « Va avec la force que tu as. » Partout où le Seigneur l’appelait, Pierre Lanarès donnait toujours le meilleur de lui-même.
Son parcours est un appel à tout jeune qui ne sait quel sens donner à sa vie : va, sert le Seigneur avec la force que tu as, et il te bénira.
LEHMANN Richard, « Hommage à Pierre LANARES », Revue adventiste, avril 2004, n° 1710, p.13.