Le texte ci-dessous est extrait du mémoire de Claude HUTIN : "Les origines du mouvement adventiste en France (jusqu’en 1920-21)" (Collonges-sous-Salève, Séminaire adventiste du Salève, 1966), p. 20-22.
"Depuis longtemps, on songeait à la capitale, mais le manque d’ouvriers et de moyens financiers était un obstacle à la réalisation d’un centre d’évangélisation à Paris. Toutefois, au cours de la 16ème session annuelle de la Conférence de l’Europe Centrale tenue à Lausanne du 18 au 27 août 1899, on décida d’agir en faveur de cette grande ville. On trouve dans le Messager de septembre 1899 les faits suivants :
« Quant à la ville de Paris, elle devrait être prise en sérieuse considération par la Conférence. Il devrait y avoir dans cette ville plusieurs églises (car il y en a 4 ou 5 à Londres, 5 à Berlin, 5 à Melbourne, 3 à Sydney…). Réunissons des fonds pour Paris et profitons de la prochaine exposition de 1900 pour y annoncer le message… » (92)
On distribua alors des petits billets pour inscrire son nom, son adresse et la somme qu’on désirait donner dans le courant de l’année pour la mission de Paris. Puis le trésorier annonça que la souscription et la collecte en faveur de cette mission avaient produit la somme de 1 065,25 frs (93). On avait quelques fonds, il manquait encore les hommes. Aussi L.R. Conradi, l’année suivante, publiait-il un bref article en première page du Messager :
Le temps étant arrivé de mettre à exécution la résolution prise à notre dernière assemblée annuelle par rapport à la fondation d’une mission à Paris, nous espérons que les frères se souviendront de nous dans leurs prières, afin que l’entreprise soit bien commencée… La fondation d’une mission est toujours coûteuse et exige des sacrifices, et ce sera surtout le cas avec celle qui nous occupe maintenant, à cause de la cherté de la vie à Paris pendant l’exposition… Ainsi nous nous attendons à ce que nos frères et sœurs partout fassent preuve de générosité, et nous croyons que nous ne serons pas déçus. » (94)
Cet appel reçut une prompte réponse, tant au point de vue pécuniaire qu’au point de vue personnel car, dès le mois d’avril 1900, Paul Roth et sa compagne s’établissaient à Paris pour y entreprendre un travail médical et pour présenter des produits diététiques à l’exposition. Auparavant, L.R. Conradi et P. Roth avaient effectué un voyage de reconnaissance en mars, au cours duquel ils cherchèrent pendant huit jours un appartement convenable pour établir une mission médicale. Ils finiront par en trouver un au 5 de la rue Dangeau, à 15 minutes du Trocadéro. Parallèlement à cette œuvre médicale, une tentative de colportage fut entreprise par les frères Scheller, Lecoultre et G. Roth, mais sans grand succès.
Le 1er rapport de l’école du sabbat que nous ayons date du 1er juillet 1900 et signale que l’école du sabbat de Paris à commencé avec 3 membres : fr. et sr. Paul Roth et fr. F. Scheller. A ce petit groupe sont venus s’ajouter très rapidement Gustave Roth avec sr. Vairet et ensuit fr. Davis Lecoultre. De temps en temps, l’école du sabbat avait lieu au Bois de Boulogne ; le directeur en était D. Lecoultre et F. Scheller secrétaire-trésorier.
Très rapidement, on s’aperçut qu’il était nécessaire d’intensifier le travail missionnaire en le complétant par des conférences publiques. Et le 21 février 1901, J. Vuilleumier, qui revenait d’Argentine, arrivait à Paris. Il était accueilli par Arnold Roth et sa compagne et il logea à la mission, 5 rue Dangeau. Il prenait contact également avec fr. et sr. Meyrat qui tenaient un magasin de produits diététiques. Ce fut le 6 avril 1901 que l’église de Paris fut organisée à la suite d’une journée de sabbat bénie au cours de laquelle eut lieu la première Cène. Les fr. Vuilleumier et Guyot, et sr. Carl furent désignés pour former un comité de nomination. Ils proposèrent comme ancien fr. A.L. Meyrat. Les 8 membres acceptèrent à l’unanimité ces propositions (95).
La famille Meyrat tenait un magasin de produits diététiques (96), 18 rue du Dragon, et sœur Meyrat rendait un bon témoignage auprès des clients en leur parlant de sa foi. C’est ainsi qu’elle fut à l’origine de la première conversion à Paris. Cette première adventiste s’appelait sœur Chappat. Elle était sage-femme. Elle fut aussi la première à être baptisée. La cérémonie baptismale eut lieu dans les bains-publics en face de la Samaritaine. Cet établissement s’appelait d’ailleurs « Les Bains de la Samaritaine ». Les premières réunions eurent lieu dans les familles et particulièrement à Auteuil chez fr. Roth, 5 rue Dangeau (97).
Dès octobre 1901 on déménage : le bureau des Signes, la salle de culte et le logement de fr. Vuilleumier furent transférés 18 place d’Italie, alors que la famille Roth se transportait 12 rue Stanislas.
En 1902, il faut signaler un événement important,
c’est l’ouverture d’un cours à Paris pour former de jeunes évangélistes. Ce
cours fut donné dans un grand appartement situé 8 rue Malebranche et il dura du
lundi 27 octobre 1902 au 13 avril 1903 (24 semaines). Corps enseignant :
-fr. Curdy, pour l’histoire, le français, la Bible.
-sr. Curdy, fr. Vuilleumier, fr. Nussbaum pour le
travail d’évangélisation.
-fr. Wilkinson et sa femme pour l’art de parler en
public, les études bibliques, l’anglais, le latin, le grec, l’hébreu.
Voici encore quelques détails : le prix du cours était fixé à 275 frs pour les six mois, en adoptant le système des deux repas. (Ce prix comprenait la chambre, la pension, le chauffage, l’éclairage et l’instruction). Nous connaissons aussi quelques noms d’élèves : U. Augsburger, H. Borle, A. Eva, E. Faver, J. Rey, L. Ruel, P. Steiner, A. Vaucher. Les résultats de ce cours furent de plus encourageants (98).
Tell Nussbaum ne resta que cinq mois à Paris. Durant cette période il donna des conférences tous les soirs, sauf le samedi, devant un petit auditoire, au 8 rue la rue [sic] Malebranche.
En 1904, nouveau déménagement. On installe le bureau central au 108 de la rue de Vaugirard. Cette année-là, on dénombre 6 ou 7 personnes qui observent le sabbat. L’évangélisation était répartie entre J. Vuilleumier, B.G. Wilkinson et F. Robert (récemment arrivé de Battle-Creek). Cette même année, U. Augsburger arrivait de Renan pour renforcer l’équipe d’évangélisation alors que la fabrique de produits diététiques, sous la direction de G. Roth, obtenait une médaille d’or à l’exposition universelle (100).
Un fait mérite d’être souligné. C’est que les premiers adventistes venaient de l’église baptiste (notamment de la rue du Maine) (101). Les baptêmes avaient lieu à l’île Saint-Maurice, dans la Marne, non loin de la jonction de la Marne et de la Seine, à Charenton (102).
U. Augsburger resta 4 années à Paris (1904-1908). Dès 1904, il était resté tout seul, les frères Vuilleumier, Wilkinson et Robert étant partis dans un autre champ. Il fut remplacé par Paul Badaut, mais il revenait à Paris en 1911. En 1913, fr. Vaucher arrivait lui-aussi [sic] dans la capitale et en 1914 fr. Tièche y donnait une série de conférences. En octobre 1915, Jules Rey venait à son tour travailler à Paris. Il écrivait dans le Messager de décembre 1916 : « le sabbat 23 septembre, les adventistes de Paris étaient réunis dans l’église baptiste, 48 rue de Lille, pour assister au baptême de 7 frères et sœurs. Lorsque vous lirez ces lignes… il y aura 3 églises adventistes dans le district de Paris : 1° l’église de la Rive gauche, qui fut l’église mère et qui compte 56 membres ; 2° celle de la Rive droite avec 35 membres et enfin le groupe de Versailles qui compte 12 membres… » (104).
Le Message adventiste était ainsi solidement implanté dans la capitale. L’église allait s’accroître encore par la suite et elle devait jouer un rôle de première importance dans l’évangélisation du reste de la France."
Notes
[Les notes font référence à des textes transcrits par l'auteur en annexe de son mémoire. Il s'agit la plupart du temps de citations de la revue Le Messager. Contacter l'archiviste pour une copie des textes référencés. Dossier aux Archives : DOC.SDA 41]
(92) Cf. document C.E.C. n°25
(93) Ibid
(94) Cf. document PA. n°1
(95) Ibid n°s 2, 3, 4, 5, 6, 7
(96) Fr. Walther de Paris me rapportait qu'il y eut par la suite jusqu'à 16 succursales de la maison "Bonne Santé".
(97) Tous ces faits m'ont été rapportés par fr. et sr. Ganty de Paris.
(98) Cf document PA. n°s 9, 10, 11, 13, 14
(99) Ibid n°13
(100) Ibid n°s 16, 17, 18, 19.
(101) Ibid. n°s 21, 23, 28. Ce point m'a été confirmé par fr. Ganty.
(102) Ibid n°s 22, 23, 24
(103) Ibid n° 25
(104) Ibid n°34