Au début de la Deuxième Guerre mondiale, les élèves et membres du Séminaire adventiste de Collonges-sous-Salève refusaient leurs tickets de rationnement de viande. La chose ne passa pas inaperçue. Dans le journal Le Petit Dauphinois du 13 avril 1941, on trouve ce compte rendu :
Quarante habitants de Collonges-sous-Salève préfèrent le fromage à la viande et refusent leurs tickets.
Ce sont, il est vrai, des « adventistes »…
Connaissez-vous beaucoup de personnes qui refusent leur carte de viande et laissent sans emploi leurs tickets de café ? Probablement pas… et cependant une seule localité de la Haute-Savoie, le bourg de Collonges-sous-Salève , vient d’enregistrer quarante de ces refus. Il ne s’agit ni de malades ni de maniaques, mais d’hommes et de femmes bien portants, travailleurs et parfaitement équilibrés.
Collonges-sous-Salève possède, en effet, une espèce de séminaire d’adventistes. Les adventistes sont les membres d’une petite Eglise, dont le principal dogme est la croyance en une seconde venue du Christ sur terre. Et, pour mériter cette nouvelle incarnation du Sauveur, les adventistes mènent une vie extrêmement réglée et s’ingénient à faire le bien autour d’eux. C’est ainsi que plusieurs de leurs centres religieux sont des hôpitaux, des sanatoria ou, tout au moins, des sortes de couvent, où ils vivent en commun dans le travail. Une de leurs règles est de ne jamais manger de viande, de dédaigner l’alcool, les raffinements culinaires et, en général, tout ce qui s’écarte de la simple nature.
Les quarante adventistes de Collonges-sous-Salève ont donc refusé leur carte de viande. Mais, comme ils avaient calculé que trois kilos de fromage ou de légumes équivalaient aux deux livres et demie de viande qui nous sont imparties mensuellement, ils ont obtenu d’échanger leurs tickets de viande contre une ration supplémentaire de fromage.
Et, à les voir travailler allègrement dans leurs différents ateliers ou dans leurs cultures, frais et vigoureux, on peut penser que la substitution est loin de leur être nuisible.
Le Petit Dauphinois, 13 avril 1941
A signaler que ce refus n’a pas duré pendant toute la guerre. Plus tard, le directeur Henri Evard a introduit une ration de viande hebdomadaire dans l’alimentation pour remédier à la carence alimentaire.