L'article ci-dessous a été publié par le journal "24 heures" le 18 juin 2012. L'auteur, Olivier Wurlod, fait l'historique de la clinique La Lignière (Gland, Suisse). L'article est accompagné d'une galerie de photos anciennes consultables sur le site du journal : ligniere.24heures.ch.
La Lignière, un vaste domaine devenue clinique de réadaptation
Depuis un peu plus de cent ans, au milieu d’un beau domaine agricole et forestier, l’établissement apporte soins, repos et bien être à sa clientèle.
Dans les jardins, devant le récent Sanatorium du Léman, de l’eau bout dans de vastes bassines. Des infirmières y trempent assidûment de larges linges. Pour conserver la chaleur, elles s’empressent alors de rejoindre les chambres de leurs patients pour les enrober de ces serviettes tiédies malgré leur diligence. Les soignantes utilisent alors les premières techniques médicales d’hydrothérapie, de massage et d’hygiène.
Ces soins se développent dès 1905 sous la houlette du docteur Perry Alfred De Forest au cœur du vaste domaine de la Lignière, ancienne annexe du château de Prangins. Originaire du Canada, il est un ancien collaborateur d’un docteur au nom aujourd’hui familier : John Harvey Kellogg. En plus d’avoir ouvert, au début du XXe siècle, 27 sanatoriums autour du monde, le médecin américain est à l’origine des céréales qui portent son nom.
Mais revenons à la Lignière ! Pour le docteur De Forest, l’opportunité de s’installer sur les bords du Léman survient lorsque l’ancien propriétaire de la Lignière, Louis-Anne-Victor Desgautières (fils d’une riche famille lyonnaise), acculé par des dettes de jeu, doit s’en séparer.
Pour une bouchée de pain, la Société philanthropique de la Lignière peut racheter le prestigieux domaine de 47 hectares, connu notamment pour avoir accueilli quelque temps Voltaire. « Fâché avec la France, il avait tout planifié pour mourir dans un lieu paisible. En l’occurrence la Lignière, dont certains documents venus du château de Prangins laissent à penser qu’il y aurait fait bâtir la maison devant la clinique, là où se trouve aujourd’hui toute notre partie administrative », raconte l’aumônier de la Lignière, Thierry Lenoir.
Rapide croissance
Envoyé en Suisse pour gérer, dans un premier temps, un centre médical bâlois le docteur De Forest débarque donc avec famille et bagages pour prendre en charge le nouvel institut. Le Sanatorium du Léman s’agrandit vite puisque, une année après son ouverture, une annexe est bâtie. Elle compte douze chambres, deux salles de bains, un cabinet de consultation et deux bureaux. Entre 1906 et 1913, les voitures attelées d’un cheval et transportant les patients entre l’institut et la gare de Gland se multiplient.
Durant la décennie suivante, l’Europe s’embrase. A la Lignière, les préoccupations sont plus légères. Pour ne pas perturber les étudiants de la récente Ecole de théologie qu’accueille le domaine, un code strict de conduite est imposé aux infirmières étudiantes : « Les élèves ne doivent pas stationner dans les locaux si elles n’y sont pas retenues par leur travail » ou « les élèves ne doivent entrer en contact avec les patients que lorsque leurs devoirs les y appellent », dictent deux extraits du règlement.
Survivre à la guerre
En 1924, le Sanatorium du Léman devient « l’établissement physiothérapique du Léman » et s’ouvre à la diététique. Au fil des ans, la clinique commence à se faire un nom. Puis vient la guerre. Entre 1939 et 1945, la Lignière connaît cette fois des temps difficiles. Les patients ne suffisent plus à ses finances. Les ventes de fruits et légumes mais aussi de fleurs cultivés sur les vastes terres du domaine apportent à la clinique le souffle d’air suffisant pour survivre au second conflit mondial.
Durant l’après-guerre et jusqu’aux années 70, la Lignière se cherche un modèle de soins. Elle ferme sa maternité, ouverte en 1915, ainsi que son bloc opératoire, qui date de la même année. Il faut attendre 1977, et l’évolution du monde médical vers une spécialisation des connaissances pour que la Lignière trouve sa voie actuelle. Chapeauté par le docteur Jaggi, l’établissement se concentre alors sur la réadaptation cardio-vasculaire.
Depuis cette année-là, si le nombre de lits s’est stabilisé à 95, la Clinique La Lignière s’est ouverte à de nombreuses autres spécialités, comme la rééducation neurologique, orthopédique et rhumatologique, mais aussi à la médecine interne ou à la psychiatrie. Quant à la dernière évolution en date, la clinique s’oriente vers les traitements ambulatoires en ouvrant son centre de santé et fitness Acquaforme.
WURLOD Olivier, « La Lignière, un vaste domaine devenue clinique de réadaptation », 24 heures, 18 juin 2012.